Les souvenirs des beaux moments passés avec vos proches tissent avec eux un lien par-delà la mort. Puisse cette rubrique vous inspirer pour retrouver et chérir ces souvenirs.
Un repas de fête sous le signe de la bienveillance
Manu Keirse, psychologue clinicien et spécialiste du deuil, est fasciné depuis son plus jeune âge par la mort et le deuil. Ou plutôt : par la manière d’y faire face. Aujourd’hui, à 79 ans, il aime toujours en parler et écrire sur le sujet. Car être préparé à vivre les moments les plus difficiles de sa vie ne peut qu’être bénéfique.
Quatre tâches du deuil pour surmonter la perte
La plupart des gens veulent être présents pour ceux qui ont perdu quelqu’un, mais ils ne savent pas quoi faire. Les quatre tâches du deuil, telles que décrites par Manu Keirse et parfaitement interchangeables, offrent des perspectives et des outils précieux pour soutenir les personnes dans leur processus de deuil et de perte.
1) Accepter la réalité de la perte. Rappelez-vous qu’il faut parfois beaucoup de temps pour accepter cette réalité (« ce n’est pas mon enfant », « je viens tout juste de voir ma mère »...). Comment aider ? Soyez toujours honnête, ne passez rien sous silence et répétez plusieurs fois ce qui s’est passé. Laissez les personnes en deuil raconter leur histoire autant de fois qu’elles le veulent. Cette liberté les aidera à dire adieu à leur proche.
2) Une fois la réalité acceptée, la douleur liée à la perte s’installe. Cette douleur peut vous transpercer. Elle vous envahit tout entier. La douleur se manifeste par des vagues de tristesse, comme les ondulations de la mer. Votre mémoire vous fait défaut, vous êtes extrêmement fatigué, en colère, irritable et agressif, et vous ressentez de la culpabilité et de la honte. Comment aider ? Osez aborder la perte. Beaucoup de gens préfèrent ne pas l’évoquer parce qu’elle est douloureuse. Or, c’est ainsi qu’on isole les personnes en deuil. Expliquez que ces émotions sont normales, que ce comportement est celui de personnes normales et équilibrées.
3) S’adapter au monde sans l’être aimé. Cette tâche est difficile, car vous devez vous adapter chaque fois que vous êtes confronté à la personnalité du défunt, à ce qu’il a accompli, à ce qu’il représentait pour vous, à ce que vous avez fait ensemble. Rentrer chez soi dans une maison vide, cacher des œufs de Pâques seul, aller seul à l’école pour discuter des résultats de vos enfants. Comment aider ? Écoutez l’histoire des personnes en deuil, prenez vous-même l’initiative, appelez-les de temps à autre. À qui pourront-elles encore raconter leur histoire d’ici un certain temps ?
4) Apprendre à continuer à vivre au lieu de dépérir. Intégrez la perte à votre (nouvelle) vie et votre avenir tout en chérissant les souvenirs et l’amour de la personne ou de la situation perdue. Vous devez intégrer la perte à votre (nouvelle) identité. Il ne s’agit pas d’oublier ni de vous détacher totalement, mais plutôt de trouver un équilibre entre l’attachement au passé et l’acceptation du présent et de l’avenir.
Manu Keirse rédige des ouvrages depuis près d’un demi-siècle et donne des conférences sur les moments difficiles d’une vie. Un bébé mort-né, un décès accidentel, un suicide, une mort de vieillesse, des soins palliatifs… Il aborde aussi le deuil blanc, qui survient lorsque vous-même ou un proche êtes touché par une maladie chronique comme un cancer ou un handicap.
Ne pas fuir
Lui-même a été confronté très tôt à la fin de vie. « J’ai été enfant de chœur pendant quatre ans lorsque j’étais en primaire. À l’époque, nous étions à peu près les seuls du village à avoir un téléphone. Le prêtre s’adressait toujours à moi lorsqu’il devait rendre visite à un mourant. Plus tard, lorsque j’étais étudiant, j’ai travaillé bénévolement dans un service d’oncologie pendant quatre ans. J’y ai constaté que les infirmiers et les médecins fuyaient les moments difficiles. Littéralement, car beaucoup d’entre eux évitaient d’aller voir le patient lorsque la sonnerie de sa chambre retentissait, par peur d’une mauvaise nouvelle. »
« Si vous n’enseignez rien sur la mort ou le décès, les gens en ont une peur bleue. »Ce manque de soutien dans les moments difficiles a fait réaliser à Manu Keirse qu’il y avait et qu’il y a toujours un énorme besoin de formation et de connaissances. « Lorsque je me promenais dans l’hôpital et que j’entendais une sonnerie, je me disais que quelqu’un devait être aux côtés du patient. Les choses ont changé aujourd’hui. Heureusement. Après mes études et tout au long de ma carrière, de psychologue à directeur d’hôpital et à l’université, j’ai continué à chercher comment apprendre aux gens à appréhender les moments difficiles de la vie. »
Au fil du temps, la mort a quitté notre salon pour se cacher derrière un épais brouillard. Selon Keirse, ce phénomène ne facilite pas le deuil.
«Aujourd’hui, tout le monde est encore confronté à la mort et au décès, mais généralement de manière très impersonnelle, à la radio, à la TV ou dans les journaux. On ne regarde plus la mort dans les yeux. On parle souvent de morts dans des circonstances horribles (guerre ou meurtre), ce qui ne fait qu’accroître la peur. C’est tout à fait différent que s’asseoir au chevet de son père ou de sa mère qui rend paisiblement son dernier souffle et passe de la souffrance à une mort sereine.
En parler et s’informer
Keirse est un fervent défenseur de l’importance de parler du deuil et d’apprendre à y faire face, de la maternelle à l’université. « On ne prend pas le volant d’une voiture sans maîtriser le Code de la route. Si vous n’enseignez rien sur la mort ou le décès, les gens en ont une peur bleue. Aujourd’hui encore, la formation des psychologues ou des médecins ne traite pas le sujet. Comment est-ce possible ? »
Que faire, dans ce cas ? « Avec les jeunes enfants, mieux vaut se baser sur ses propres expériences. Lorsqu’ils perdent un grand-parent, les enfants veulent poser des questions. Parlez-en avec eux, n’ayez pas peur. Apprenez-leur également que tout ce qui vit meurt, des fleurs et des plantes aux animaux et aux êtres humains. La mort fait partie du cycle de la vie.
Apprenez-leur à dire adieu à une tante ou à un grand-parent, mais aussi à un camarade de classe victime d’un accident. Les enfants doivent comprendre ce qui s’est passé, sinon ils auront peur. Mais veillez toujours à créer une atmosphère chaleureuse lorsque vous rentrez chez vous après un dernier au revoir. Prenez le temps d’écouter vos enfants, laissez-les s’exprimer, acceptez qu’ils veillent un peu plus tard et offrez-leur une tasse de chocolat chaud.»
DELA et Plantyn ont créé un dossier pédagogique qui lève le tabou autour de la perte et du deuil.Téléchargez ici gratuitement le matériel pédagogique pour une classe maternelle ou une classe primaire.
Ou lisez le témoignage d’adieu de Plume Noire ou le témoignage de réconfort de toupie.
Les fêtes de fin d’année approchent à grands pas. Mais elles sont parfois bien tristes. « C’est vrai et c’est tout à fait compréhensible. Les activités extérieures sont interrompues, il n’y a pas école, vous n’allez pas travailler, vous restez chez vous ou en famille. L’absence d’un être cher, cette chaise vide, devient soudainement très palpable. L’important est d’avoir conscience que ce sera difficile, afin d’éviter d’être submergé par la situation. Prévoyez de vous occuper ces jours-là, pendant les fêtes, mais aussi lors des anniversaires (de décès). Ces moments sont difficiles. Et c’est le seul moyen de ne pas perdre pied et de maîtriser la situation. »
Jamais trop
« On croit, à tort, que le temps ne guérit jamais les blessures. Au même titre qu’il faut soigner une blessure pour éviter qu’elle s’aggrave, il faut aussi gérer le deuil avec douceur afin de digérer la perte. Et n’oubliez pas que surmonter une perte nécessite un travail de deuil. Pendant les fêtes, je suggère toujours aux gens de faire appel à un traiteur plutôt que de cuisiner eux-mêmes tout le repas. Faites également attention à l’alcool, car il peut vous faire sombrer complètement. Reposez-vous suffisamment ; votre corps en a besoin. Demandez aux personnes qui ne trouvent peut-être pas les mots d’écrire sur une carte un souvenir du défunt et accrochez-la au sapin de Noël. Vous pourrez ensuite lire ces cartes à votre aise, quand vous le voudrez, pour alléger votre peine ».
Là encore, être renseigné sur le deuil peut apporter beaucoup de réconfort. « Réfléchissez bien à ce que vous pouvez faire si vous vous asseyez à côté de quelqu’un qui a perdu un être cher. En général, on lui demande comment il se sent. Si cette personne répond qu’elle va bien, vous pourriez en douter. Si elle répond qu’elle ne va pas bien, vous pourriez vous sentir mal à l’aise et ne pas savoir quoi dire. Quoi qu’il en soit, montrez-vous toujours intéressé et dites-lui que vous êtes là pour l’écouter. Si elle ne vous fait pas part de sa douleur dans l’immédiat, elle le fera peut-être plus tard. Et n’évitez jamais de parler par peur de trop en demander à la personne en deuil. Un geste de réconfort, quel qu’il soit, n’est jamais de trop. N’hésitez pas à écrire une carte à tous ceux qui ont perdu un être cher, même si le décès remonte à plusieurs années, pour leur montrer que vous pensez à eux ».
Téléchargez ici les cartes DELA à envoyer à quelqu’un qui a perdu un être cher.
Chérir les souvenirs
Les repas de fête peuvent s’avérer agréables et chaleureux, même dans des circonstances difficiles. « Mourir, c’est quitter le monde extérieur pour entrer dans le cœur des gens qui restent. Ceux qui nous ont quittés vivront à travers nous pour toujours. Se retrouver en fin d’année, c’est l’occasion de partager des souvenirs, de créer une connexion. Un décès permet aussi souvent de ressouder les familles. »
Keirse a un jour reçu une lettre d’un grand-père qui avait lu son billet sur la manière de gérer la perte et la tristesse durant les fêtes.
« Quelques semaines après le Nouvel An, j’ai reçu une lettre dans laquelle un grand-père écrivait que personne n’avait envie de faire la fête cette année-là après le décès de son petit-fils Matthias dans un accident de la route. Ils avaient tout de même fêté Noël. Les petits-enfants avaient décoré le sapin, car Matthias avait toujours beaucoup aimé le faire. Ils avaient sablé le champagne pour célébrer la belle vie de Matthias. Et au lieu de cuisiner, au risque de pleurer derrière les fourneaux, ils avaient fait appel à un traiteur. Le désarroi lié à l’absence du garçon avait cédé la place aux sourires et aux souvenirs. Le grand-père ajoutait que ce fut de loin la fête la plus difficile qu’ils avaient jamais célébrée, mais aussi la plus chaleureuse. Jamais les membres de la famille n’avaient été aussi prévenants les uns envers les autres. Il régnait un climat d’extrême bienveillance dans cette famille, malgré la période particulièrement difficile. »
Lisez ici notre blog pour obtenir des conseils afin de commémorer vos proches décédés durant les fêtes.
Quatre tâches du deuil pour surmonter la perte
La plupart des gens veulent être présents pour ceux qui ont perdu quelqu’un, mais ils ne savent pas quoi faire. Les quatre tâches du deuil, telles que décrites par Manu Keirse et parfaitement interchangeables, offrent des perspectives et des outils précieux pour soutenir les personnes dans leur processus de deuil et de perte.
1) Accepter la réalité de la perte. Rappelez-vous qu’il faut parfois beaucoup de temps pour accepter cette réalité (« ce n’est pas mon enfant », « je viens tout juste de voir ma mère »...). Comment aider ? Soyez toujours honnête, ne passez rien sous silence et répétez plusieurs fois ce qui s’est passé. Laissez les personnes en deuil raconter leur histoire autant de fois qu’elles le veulent. Cette liberté les aidera à dire adieu à leur proche.
2) Une fois la réalité acceptée, la douleur liée à la perte s’installe. Cette douleur peut vous transpercer. Elle vous envahit tout entier. La douleur se manifeste par des vagues de tristesse, comme les ondulations de la mer. Votre mémoire vous fait défaut, vous êtes extrêmement fatigué, en colère, irritable et agressif, et vous ressentez de la culpabilité et de la honte. Comment aider ? Osez aborder la perte. Beaucoup de gens préfèrent ne pas l’évoquer parce qu’elle est douloureuse. Or, c’est ainsi qu’on isole les personnes en deuil. Expliquez que ces émotions sont normales, que ce comportement est celui de personnes normales et équilibrées.
3) S’adapter au monde sans l’être aimé. Cette tâche est difficile, car vous devez vous adapter chaque fois que vous êtes confronté à la personnalité du défunt, à ce qu’il a accompli, à ce qu’il représentait pour vous, à ce que vous avez fait ensemble. Rentrer chez soi dans une maison vide, cacher des œufs de Pâques seul, aller seul à l’école pour discuter des résultats de vos enfants. Comment aider ? Écoutez l’histoire des personnes en deuil, prenez vous-même l’initiative, appelez-les de temps à autre. À qui pourront-elles encore raconter leur histoire d’ici un certain temps ?
4) Apprendre à continuer à vivre au lieu de dépérir. Intégrez la perte à votre (nouvelle) vie et votre avenir tout en chérissant les souvenirs et l’amour de la personne ou de la situation perdue. Vous devez intégrer la perte à votre (nouvelle) identité. Il ne s’agit pas d’oublier ni de vous détacher totalement, mais plutôt de trouver un équilibre entre l’attachement au passé et l’acceptation du présent et de l’avenir.