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Parler de la perte d’un être cher autour d’un café, d’un livre et d’une bière
Marleen Brion a perdu son fils Michiel, âgé de 34 ans, dans un accident de la route en 2020. Au cours de son processus de deuil, elle a décidé de ne pas se laisser abattre. Elle a trouvé des moyens de rendre son chagrin plus supportable, tout en aidant d’autres personnes endeuillées en organisant des rencontres qui permettent de lever le tabou autour de la mort.
Un lieu de parole pour parler du décès d’un proche
Un café deuil ? « C’est un groupe de parole où les gens qui le souhaitent peuvent venir raconter un deuil qu’ils ont vécu, et qui reste difficile pour eux », explique Sébastien Huet, entrepreneur de pompes funèbres au centre funéraire Marion DELA dans la région de Namur, et organisateur de « café deuil ». En pratique, un café deuil, aussi appelé café mortel, est une rencontre entre personnes autour d’un café et d’un petit biscuit. « Cela se passe dans une salle de réception dans un cadre champêtre et les gens s’installent autour d’une table. Une accompagnatrice thérapeute spécialisée dans le deuil est présente et chacun s’exprime librement, sans obligation », continue-t-il.
Ce lieu d’expression apporte beaucoup de choses aux participants. « Je fais une comparaison avec un mariage, un événement heureux pour lequel on se prépare pendant un an. Ici, on parle d’un événement loin d’être heureux où tout doit se régler entre 3 et 5 jours. Un événement qui nous touche très fort et qui provoque de nombreuses émotions, de la tristesse à la colère en passant par l’anxiété ». Comment vivre après cela, comment se remettre du décès d’un proche que l’on a vu mourir devant nous ou lors d’un accident violent ? « Dans un monde où tout va toujours trop vite, on n’a pas toujours le temps de mettre des mots sur ce qu’on a vécu et le café deuil permet de le faire », conclut Sébastien Huet.
Café de deuil
Marleen : « Apprécié de tous, Michiel était le propriétaire d’un café. Cela m’a donné envie d’y organiser des cafés de deuil. Il s’agit de rencontres informelles qui permettent de parler ouvertement du deuil et du décès d’un être cher. J’en organise quatre par an, autour d’un thème différent : de la perte d’un conjoint, d’un parent ou d’un ami proche à celle d’un enfant. »
« Chaque édition voit intervenir un orateur différent afin d’inspirer les proches. Une écrivaine y a présenté son livre dédié au deuil, un musicien a interprété des chansons très personnelles sur des personnes décédées, un dessinateur a réalisé des cartes personnalisées des êtres disparus. Nous avons à cœur de mettre ces personnes en lumière et de montrer ce qui existe pour aider les gens dans leur deuil. »
Avec un café et un livre
« J’ai également contribué à la fondation du groupe de deuil ( Verlies Verbindt, le deuil nous réunit…), qui regroupe des personnes en deuil. Avec quelques bénévoles, nous organisons chaque mois un moment ‘Koffie en boek’ pour discuter des livres avec un café dans notre local à Boutersem et au Barboek, le café du musée M à Louvain. L’occasion pour les proches de partager leurs expériences autour d’un cappuccino, souvent en cercle restreint. Ou de discuter d’un bon livre qui les a aidés. »
« Je reçois parfois des messages de remerciement par la suite et j’apprends que des personnes qui ne se connaissaient pas du tout sont allées manger ou boire un verre ensemble. C’est merveilleux et réconfortant de voir à quel point la perte d’un être cher peut rapprocher les gens. »
Bibliothèque du deuil
« Les livres ont un pouvoir incroyable. Nous aimons tous les livres : Michiel, moi-même et toute notre famille. Nous restons liés par la lecture. Pendant mon processus de deuil, j’ai beaucoup lu sur la perte et le deuil. Mes lectures m’ont incitée à créer ma propre bibliothèque du deuil pour l’ASBL Verlies Verbindt. Toute personne qui le souhaite peut emprunter gratuitement des livres ou en donner. Notre bibliothèque compte déjà environ 300 livres. »
Un juste équilibre
« Nous organisons également des concerts commémoratifs, des petits-déjeuners, des brunchs, des balades et d’autres activités. Grâce à cette diversité d’initiatives, nous nous adressons chaque fois à des personnes différentes. L’organisation de toutes ces activités m’a personnellement aidée à faire face. Mon fils est décédé à l’hôpital où je travaillais. Mon lieu de travail était soudainement associé à la mort de Michiel, ce qui n’a pas simplifié les choses. Je n’ai pas pu continuer à y travailler. J’ai donc dû trouver un autre moyen d’occuper mon temps judicieusement. »
« Mais il est essentiel de trouver un bon équilibre. On ressent souvent un contrecoup après ces activités. La tristesse nous envahit à un certain moment. Il est donc important de surveiller ses limites, mais aussi de vivre le moment présent. Mes petits-enfants m’insufflent beaucoup d’énergie, et j’aime aussi partir en vacances en camping-car. Ces moments de détente sont vraiment nécessaires pour recharger les batteries et aller de l’avant. »
Lisez-en plus ici sur l’intérêt des groupes de soutien. Vous cherchez un groupe d’entraide près de chez vous ? Jetez un coup d’œil ici.